Retrouvailles peu joyeuses (LIBRE)

Patte de Givre s’ennuyait, lassée du manque de dangers du camp, seule dans son coin. Les autres chatons jouaient ensembles, mais elle en était incapable, tout simplement parce que elle n’avait pas d’amis, les chatons la traîtant de chatte sans parents, lui reprochant de n’être pas née au sein du clan. Les moqueries, Patte de Givre s’en contre - fichait. Elle s’était endurçie au fil des lunes, et elle y était maintenant impérméable. Au milieu du camp, face au promontoire, elle attendait un évenement inattendu, quelque chose qui pimenterait à nouveau sa vie morne et ennuyeuse. Sa dernière mésaventure ne lui avait pas suffi ( https://guerredesclans.frenchboard.com/la-pouponniere-f116/sortie-automnale-t16438.htm ). Elle soupira puis se dirigea vers la réserve de gibier, car, même si le soleil était à son zénith, elle n’avait pas mangé de la journée. Elle se pris un pinson et commença à le déplumer. Une fois son repas terminé, la chatonne regarda la sortie du camp avec mélancolie, sachant que son chef l’avait consignée dans l’enceinte du camp.

Voyant le centre du camp vide et les autres chats faire leur toilette ou leur sieste, la chatonne galopa vers la pouponnière, enjambant silencieusement les corps des reines endormies, puis sortit par un trou causé par la vieille attaque des renards. Pour une fois, dans cette saison automnale fraiche, le soleil brillait et le ciel était clair. La chatonne avait une idée très précise de ce qu’elle allait faire : retrouver son père, lui parler coeur à coeur de son départ précipité et lui demander entre quatre yeux pourquoi il l’avait abandonnée aussi lâchement. Elle longea le sentier du tonnerre où plus aucun monstre ne passait en vombrissant, et se retrouva hors des territoires de son clan, dans le village de bipèdes. La chatonne voyait toutes sortes de nids de bipèdes, et des chats longeant les clôtures de jardins. Soudain, elle sursauta et miaula de peur : un molosse était à une queue de renard d’elle, attaché à son nid par une chaîne. Elle le contourna et trouva en bout de chemin des poubelles où un clan entier de solitaires venaient s’approvisionner. Elle remarqua un mâle angora gris et blanc, puis elle le reconnu grâce à sa cicatrice sur l’oeil : son père ! Elle l’avait retrouvé !

Emue par la joie, elle accoura vers son père, quand elle stoppa net : Il était accompagné par une chatte brune tigrée famélique, qui lui léchait le menton, enroulant sa queue autour de la sienne. Mais ce qui fit pleurer la chattonne ne fut pas cet autre amour, mais les quatres chatons suivant l’amante de son père ! Pourquoi l’avait-il abandonnée lâchement, elle, alors qu’il avait accepté cette portée ? En larmes, elle parcoura à la vitesse de l’éclair le chemin la ramenant à son camp, puis s’effondra devant l’entrée du tunnel d’ajoncs. Plusieurs sentiments se mêlaient dans sa tête : colère, haine, sentiment de trahison, tristesse, et... joie. Elle était contente de savoir son père en vie, et qu’il menait une existence paisible, contrairement à la sienne : seule, sans amis, la petite chatte ce sentait trahie, rejetée, humiliée. Elle galopa vers la pouponnière, versa encore quelques larmes, puis s’endormi dans une succession de rêves et de cauchemars, jusqu’au lever du soleil.