La vie et la Mort, un chaton et un ancien. [Tatie ♥]

Petit Cosmique

Le jour se lève. Encore un nuit blanche. Impossible de dormir. Chaleur étouffante de la pouponnière. Mais là, c'est mieux. Une balade nocturne. Rien de mieux. Les yeux planté dans le soleil levant, je pense. Pourquoi un jeune chaton comme moi ne peut-il pas supporter la pouponnière ? Pourquoi un jeune chaton comme moi existe-il ? Y a-t-il vraiment une force surnaturelle capable de déclencher la foudre ? Les voit-on vraiment dans nos rêves ? Pourquoi se poser tant de questions ? Pourquoi ne pas fermer les yeux ? C'est si simple de fermer les yeux. Je ferme les yeux. Voilà, c'est tout. Après tout, peu importe. A quoi bon réfléchir, je mourrai un jour, et tout le monde oubliera mon nom. Naître, vivre, mourir. Peu importe le reste. Je ne suis qu'un chaton, un minuscule petit chaton, dans ce monde si immense. Et alors ? Peu importe.
Quelqu'un a-t-il déjà essayé de fermé les yeux ? Un jour, s'est-il dit "A partir d'aujourd'hui, je ferme les yeux." ? Après tout, pourquoi pas. La vue prend beaucoup d'énergie. Mais peu importe. Nous sommes ainsi fait. Inutile de s'embêter avec des choses idiotes. Vivons, c'est tout.
Chat blanc, à ma droite. Je le fixe. Pas un chaton, ouf. Ni un apprenti qui se dandine fièrement. Pas un guerrier. Un ancien, peu-être. Je suppose qu'il m'a vu. Après tout, un chaton planté juste devant le soleil, ça se voit. Peu importe. Je secoue mes pattes engourdies par la nuit. Nuit sans sommeil, encore. Après tout, notre passage sur terre est court, autant en profiter, non ? Peu importe, peu importe. Naître, vivre, mourir. C'est tout.

L’Ancêtre
Le stupide lapin gris souris pas très dodu…





Un lapin. Pas très dodu. Gris souris. Vraiment pas malin. Pile ce qu’il me faut. Les étoiles jouent à cache-cache avec les nuages. La lune, elle, s’amuse à essayer de sauter par-dessus. Sourire. Des jeux de chatons. Dans le ciel. Elle me disait souvent que ses ancêtres habitaient là-haut. Et formaient la Toison Argentée. Drôle de nom pour un cimetière. Car ce n’est ni plus ni moins qu’un cimetière. Un cimetière féerique, certes, mais un cimetière tout de même. De ceux où on a une seconde vie. Et où tout est en paix.

Je sais désormais qu’elle les a rejoints. Son âme s’est élevée vers eux. Ils me l’ont prise. Ça me fait mal. Toujours. Le lapin est parti. Je relève la tête. De toute façon, je n’ai pas faim. Pensée aussitôt contredite par le grondement de mon estomac. Soupir. Je me redresse. La nuit est bien avancée. Autant rattraper mon repas. L’hiver est une période difficile pour un vieux chat comme moi. Je commence donc à marcher. Mes pattes sont un peu raides après tout ce temps passé dans la neige mais qu’importe.

Après plusieurs minutes à avancer, je finis par me demander où est passé ce maudit lapin. Peut-être a t-il grimpé à un arbre ? Oui, c’est tout à fait possible. Un lapin a des griffes, comme les chats. Alors pourquoi pas ? Parce que sinon, on aboutit à la théorie du lapin volant. Ce qui est également plausible ceci dit. Il aurait put être attrapé par un faucon ou tout autre oiseau de proie. Et là pouf ! Il vole ! Et puis moi, j’ai déjà vu un chat comme ça. Il était croisé avec une tartine, avait un arc-en-ciel dans les fesses et il volait.

La preuve que tout est possible. Mais bref, revenons à mon lapin. Qui est censé être stupide. Pas très dodu. Et gris souris. Voyons… Que ferais-je si j’étais un lapin gris souris pas très dodu et vraiment pas malin ? C’est bien simple ! J’irais me nourrir ! Mais alors, où trouver de la nourriture pour lapins gris souris pas très dodus et stupides ? Ça, c’est une excellente question. Je m’effondre sans vraiment m’en rendre compte. De toute façon, on ne me voit pas vraiment dans la neige. Enfin si, mais juste le rose.

Et puis aussi mes yeux mais alors il suffit que je les ferme. Bon. Un lapin gris, ça se voit. D’abord. Ensuite… Ben ça mange des champignons. Et de l’herbe. Et comme il n’y en a pas en cette saison, il doit mourir de faim, mon lapin. Et pourtant il trouve le moyen d’être un peu dodu. Donc il a une réserve. C’est peut-être un carré d’herbe qui résiste au froid ? Caché dans un terrier ? Ou pas. Parce que si ça résiste au froid, pas besoin d’un terrier surchauffé. Donc ma proie a un point de ravitaillement. Si je le trouve, je trouve à manger.

Je me relève donc. Et oui, j’aime les donc. DONC, je me relève et je marche. J’essaye d’humer l’air avant de me rappeler brusquement que mon museau est bouché. Maudissant le froid et mes rhumatismes, j’avance dans la poudreuse. Je dois avouer que c’est très joli, l’hiver. Et puis on y voit bien les lapins gris souris pas très dodus et stupides. La neige, ça scintille sous le doux soleil hivernal. Sauf que là, c’est la nuit. Bientôt l’aube. Bientôt l’heure de rentrer dormir. Et j’ai toujours faim. Maudit lapin… Même pas fichu de rester à sa place le temps de rêver…

Je marche dans la neige. Encore. Le maudit lapin n’a toujours pas pointé le bout de son museau. Il m’énerve ce lapin. Mais je n’ai pas envie de courir. La flemme. Ben oui, je suis vieux. La neige ne tombe plus depuis plusieurs jours. C’est dommage quand même. C’est joli tous ces petits flocons qui arrivent du ciel. Et puis, sans m’en rendre compte, j’arrive aux Runes Antiques. Elle m’avait dit qu’apparemment, c’était le repère de ses ancêtres. Peut-être que je la verrais ? Et qu’elle m’aiderait à trouver mon lapin ?

En tout cas, il y a un chat. Ce n’est pas elle, bien sûr. C’est un chaton. Et à cause de mon museau bouché, je ne sais pas de quel Clan il est. Ça m’énerve. Il me regarde. L’air pas du tout concerné. Bizarre ce chaton. Peut-être que c’est un de ces sanguinaires. Peut-être qu’il va essayer de me tuer. Peut-être qu’il est déjà mort. Peut-être qu’il a fugué. Peut-être… Ça fait déjà trop de peut-être. Déjà trop de choses que je ne comprends pas. Et trop d’imagination. Quoique… Moins que d’habitude en fait.

- Dis-moi petit, tu n’aurais pas vu un lapin gris souris pas très dodu et l’air vraiment pas malin dans le coin ?


[Waouh, première fois que j'écris au présent ! ._.]

Petit Cosmique

- Dis-moi petit, tu n’aurais pas vu un lapin gris souris pas très dodu et l’air vraiment pas malin dans le coin ?

"Un lapin gris souris". Il compare un lapin à une souris. Un lapin à une souris. Je le fixe. Le détaille. Aussi blanc que neige. Une neige qui semble éternelle. Ainsi, ce chat serait aussi éternel que je suis éphémère. Les rôles s'inversent. Il est la vie, je suis la mort. Un chaton et un ancien au lever du soleil. Mais il a quand même comparé un lapin à une souris. Peu importe qui est la vie, qui est la mort. Nous ne sommes pas éternels. Je ne suis qu'un chaton. Il est un ancien.
Je tourne la tête vers le soleil qui monte petit à petit. La nuit s'efface peu à peu. J'inspire l'air nocturne frai avant qu'il s'évapore. Naître, vivre, mourir. Peu importe le reste, n'est-ce pas ? Je ne suis qu'un chaton. Un chaton insomniaque, même. Je suis encore parti de la pouponnière. Je crois que je vais encore me faire gronder. Peu importe. Bon, c'est pas tout, mais il faudrait peut-être que je réponde à sa question un jour.
La neutralité totale. Pas une once de sentiment. Pas un frémissement. Pas une émotivité. Absolument rien. Le néant. Oui, c'est un peu ça. Le néant. Enfin pas exactement, en fait. Mais peu importe. Je dois répondre. Voix neutre.

- On n'apprends pas à un chaton à faire la différence entre un lapin et une souris. Alors un lapin gris souris, encore moins.

Je me tourne vers lui. Complètement. Je plante mes yeux dans les siens. Assis plus en hauteur que lui, je le domine. Les rôles sont inversés. Un chaton-mort dominant un ancien-vie. La vie doit s'amuser, quelque fois. Peu importe, ça ne me regarde pas. Naître, vivre, mourir. Peu importe le reste.

L’Ancêtre
And I would like to try…





- On n’apprend pas à un chaton à faire la différence entre un lapin et une souris. Alors un lapin gris souris, encore moins.

Ah. D’accord. Visiblement, cette boule de poils n’avait pas compris la métaphore. Bizarre tout de même. Il m’avait l’air intelligent. Remarque, si on se fiait seulement à sa première impression, on n’irait pas bien loin. Moi j’aurais l’air de quoi ? A coup sûr, d’un vieux fou, un chat qui n’a pas toute sa tête. Peut-être avais-je l’air sympa mais naïf. Et stupide. J’étais presque certain d’avoir un sourire accueillant et joyeux. Et… Bon. D’accord. Dans mon cas, la première impression était sûrement la bonne. Peut-être était-ce le cas pour tout le monde ? A moins que je ne sois une exception. Encore.

Oui, encore. Vous en voyez souvent, vous des chats comme moi ? Qui ont eu une vie pas facile mais qui continuent à fuir la mort ? Qui ont rencontré l’amour alors qu’ils étaient défigurés ? Qui, désormais, parlent à des lapins roses carnivores et des éléphants bleus ? Non, ne répondez pas. Je sais que ce serait inutile. Vous objecteriez. Vous diriez : « Oui j’en ai déjà vu ! Et puis blablabla… Mais nanana… ». Je vous connais. Je connais le mode de pensée général des chats. Des Bipèdes aussi. Ce n’était pas bien compliqué. Il suffisait de prendre une mine vexée et de ne rien comprendre.

Et ne pensez pas que je suis dans une mauvaise période. Que j’en veux à la Terre entière. Ce n’est pas vrai. Vous le savez très bien. Mais tout ce que vous voulez c’est montrer votre tête d’enfant buté et déclarer que je suis méchant. Foutaises ! Tout ce que j’ai dit jusqu’à présent est véridique. Impossible à nier.

- Sans doute. J’avais oublié qu’ils ne prennent pas la peine d’instruire ceux qui en ont besoin. Quoi qu’il en soit, je voulais parler d’un lapin au pelage gris comme celui d’une souris. Tu ne l’a pas vu ?

Lapin gris souris. Il est vrai que ça pouvait tromper les simples d’esprit. Hors, ce jeune chat ne m’avait pas l’air simple d’esprit. Au contraire. Il me semblait complexe. Ce chaton me dominait. Grâce à son petit promontoire. Brusquement, j’eus l’impression que nos rôles s’étaient inversés. Lui, l’ancien. Moi, le chaton. Lui, qui me domine. Moi, qui suis dominé. Je frémis. N’avait jamais eu l’impression de dominer qui que ce soit. A part peut-être les marguerites du coin. Ou peut-être les pâquerettes. Vraiment stupides les pâquerettes. Pire que les marguerites.

- Enfin bon. J’ai relativement faim donc s’il n’est pas passé par ici, tant pis.

Fichu flair. Fichu hiver. Fichu lapin gris souris pas très dodu censé être stupide.

Petit Cosmique

Petit Silence. Le chat semble réfléchir. Il a bien le droit, après toi. Il a surement bien plus d'expérience que moi. Sur ce monde. Sur cette terre. Peu importe. Il répond.

- Sans doute. J’avais oublié qu’ils ne prennent pas la peine d’instruire ceux qui en ont besoin. Quoi qu’il en soit, je voulais parler d’un lapin au pelage gris comme celui d’une souris. Tu ne l’a pas vu ?

Bien. Je réfléchis. Les yeux fixé sur le soleil levant. Je n'ai pas bougé de la nuit. J'énumère donc chaque proie que j'ai vu. Après tout, il faut bien que je lui réponde. Il m'a posé la question. Il n'a pas l'air austère. Donc, le gibier. Le vent souffle sur ma fourrure touffue. Petite boule de poil sur un rocher. Je ne quitte pas la soleil des yeux. Le ciel, encore une fois. Mes yeux naturellement attirés par la voute céleste. Peu importe, naître, vivre, mourir. C'est tout.
Voix neutre, pas un frémissement, assez lentement. Je dis.

- Trois mulots : deux bruns, un noir. Quatre corbeaux noirs. Deux lapin : Un brun, un blanc. Pas de "Lapin gris souris".

Immobile. Je regarde le soleil, toujours et encore. Peu importe s'il me répond. Peu importe qu'il parte ou qu'il reste. Le jour se lève. Je vais encore me faire punir. Quoique, peut-être sont-ils habitués à ce que je disparaisse. Peu importe. Naître, vivre, mourir. N'est-ce pas ?