Les épreuves seront là, toujours et éternellement là. Mais tout est à ta portée, tu le sais. Avance. Ne te retourne pas. Je serai toujours là. Ma fille, mon enfant... je t'aime. Je serai à tes cotés dans tous les moments difficiles. Je te le promets. Ne regarde pas derrière toi,pas même une seconde. Tu es forte, je le sais. Surmonte ta peur, ne la laisse pas te vaincre, ne la laisse pas t'emporter dans une période de douleur et d'angoisse. Ne te laisse pas détruire par la solitude. Non, ne pleure pas. Je te l'ai dit, je serai toujours là. Je t'aime...
J'ai alors douze ans, en ce jour que je déteste tant, où elle est morte. Quand je me suis retrouvée seule, orpheline. Ma mère, que je surnommais affectueusement El, est partie rejoindre mon père, dans les cieux brillants comme des diamants. Mon père que je n'ai jamais connu. John Swan. Il est mort à ma naissance, dans un conflit inconnu de tous, même de moi. Mais, aussi étrange que cela puisse paraître, il ne me manque en aucun cas. Il nous a laissées seules, dans un monde vaste et compliqué, dans un endroit inconnu. Sans savoir pourquoi, suivant mes humeurs, je le hais ou je l'aime. Après la mort de celle qui m'est si chère, sans maison, triste, et perdue dans un monde qui me semble cauchemardesque, mes grands-parents m'ont recueillie. Je vis alors chez eux, forcée de regarder chaque soir avec eux les quelques rares photos de ma mère ou des films à l'eau de rose. Mais malgré leur lenteur à comprendre mes sentiments et leur vieillesse, je les aime. Ils ne sont ni mes amis, ni mes parents. Mais ils me sont très proches. C'est ma deuxième famille en quelque sorte, bien qu'elle ne remplace pas celle que j'ai perdue.
Ma chambre est bien trop grande pour moi. Mais les couleurs me plaisent énormément. Bleu ciel et bleu mer. Blanc Neige et gris perle. Les meubles en bois, aussi vieux que la maison, sont marrons. Couleur bois, quoi. Vieilles couettes, vieux rideaux, presque tout me semble ancien. Sauf la peinture, que j'ai fait avec mon grand père quelques temps après mon arrivée. C'est mon petit royaume de princesse, dans lequel je m'amuse à me raconter des contes de fées, sautant sur le lit ou me glissant sous les fauteuils, cherchant de nouvelles aventures. Mais depuis peu, je ne vois plus rien. Je ne me glisse plus entre les buissons du jardins, je ne marche plus sur les belles pierres grises et plates qui servent de chemin. Je ne regarde plus la télévision. Je reste allongée sur mon lit, les yeux ouverts, sans voir le plafond.On a tout essayé, mais ça n'a servi à rien. Je resterai aveugle toute ma vie. La maladie qui m'affecte est encore inconnue et aucun médicament ne semble pouvoir la soigner. Je tends une main tremblante vers ma table de chevet, cherchant le contact froid de mon verre d'eau. Je hais cette incapacité à bouger ou prendre des choses. Ma grand-mère me dit qu'au bout de quelques temps, j'y arriverai. Mais cela me semble tellement improbable. Tous mes espoirs s’effondrent sans aucune retenue. Je passe mes journées à pleurer, collant mes genoux contre ma poitrine et cachant mon visage en larmes derrière mes cheveux blonds et ondulés que je ne verrai plus jamais. En chemise de nuit, je reste là jours et nuits, me lamentant sur ma misérable vie quand je ne peux plus pleurer. Il n'y a qu'une chose que j'ai envie de faire. Me haïr.
Il fait nuit, tout le monde dort. Tous le monde sauf moi, debout sur le palier, un sac rempli de vêtements pris au hasard et du minimum de "survie" à la main et avançant à tâtons parmi les meubles anciens. Malgré mon agilité perdue, je ne fais pas de bruit. Je laisse un mot à l'écriture irrégulière sur le sol. Un mot qui dit:
Je pars, ne m'en voulez pas. J'ai treize ans, je suis aveugle et j'ai perdu mes parents. Un peu plus chaque jour je me sens seule. Pour l'heure, mon désir le plus proche est de redécouvrir mon monde, ma vie. Je reviendrai peut être un jour, si je ne me perds pas en chemin. Je vous aime.
J'ouvre la porte en chêne doucement, ne voulant réveiller mon grand-père qui a l'oreille plutôt fine. Ma grand-mère, elle, est presque sourde. Ma haine s'est calmé, je me précipite vers le portillon qui est la dernière issue de la propriété à franchir. Je m'engage sur le chemin de pierres plates, me remémorant le nombre incalculable de fois où j'ai fait ce geste banal. J'ignore si le bus est là, au bout de la rue, mais je continue d'avancer. Le petit portail s’entrouvre et je m'engage sur le trottoir. Par pur réflexe, je lève la tête vers le ciel, espérant l'apercevoir au moins une dernière fois. Non, tout ce que je peux faire maintenant, c'est l'imaginer. Le froid est plutôt mordant, un frisson parcourt alors mon corps tandis que je pivote vers la droite, vers mon objectif. Je l'entend, le bus est là. Marchant le plus vite possible, les mains tendues vers l'avant et ne voulant me prendre un stupide obstacle, j'essaye d’analyser les sons m'entourant. Ayant maintes-fois observé l'arrêt du transport en commun, je sais que le chauffeur sort toujours aider les personnes infirmes comme moi. Je sais aussi qu'il m'aime bien et qu'il a pitié de moi, bien que je n'apprécie pas ce sentiment.
Son regard me brule, bien que je ne puisse le voir. Il se demande surement ce que je fais ici, seule et un sac à la main. Je ne peux l'ignorer, c'est malpoli. Je penche la tête, comme pour dire bonjour. Je m'arrête, écoutant les moindres bruits qui parviennent à mes oreilles plus développées qu'avant.
- Bah ma petite, que fais-tu ici? Tu ne devrais pas être chez toi avec tes grands-parents?
Trop curieux. Je n'aime pas les personnes comme ça. Masquant ma contrariété, je relève mon regard vide vers lui, devinant grâce à ses paroles qu'il se trouve devant moi. Encore un idiot. C'est agaçant de rencontrer des personnes ainsi.
- Non monsieur, je vais chez ma tante, car mes grands-parents vont partir en voyage avec des amis.
- Et ils ne t'emmènent pas? C'est étonnant.
- J'ai eu la même réaction que vous monsieur. Pouvez m'aider à monter et me dire quand je serai au dernier arrêt?
- Bien sur.
Le contact chaud et poisseux de sa main me fait frissonner de dégout. Me prenant par la main, il m'entraine à l'intérieur du bus et me fait m'assoir sur un fauteuil qui, d'après le nombre de pas que j'ai eu à faire, se trouve derrière son siège. Je souris pour le remercier, bien que ce soit la première fois depuis quelques semaines.J'appuie ma tête contre la vitre froide et ferme les yeux pour penser, bien que cela ne change rien.
Le temps passe rapidement, le chauffeur m'annonce le dernier arrêt, me jetant un regard empli de pitié que je sens malgré mon handicap. Je ne veux pas que l'on me plaigne, cela me met hors de moi. Je sors, avec celui qui se veut être l'ange gardien de ma nuit de voyage et pivote en entendant le bus partir. C'est ici qu'ils habitent... Je me mets à marcher, sachant qu'après l’abri-bus, il faut faire une vingtaine de pas vers la droite pour arriver devant la maison de mon autre famille. D'après l'activité qui commence à naitre dans ce petit village de campagne, je me doute qu'il doit être environ 9 heures du matin. Je m'arrête et me tourne vers la maison, m'approchant du portillon et cherchant à tâtons la sonnette. Je sonne, ce qui est tout naturel. Le bruit de la porte qui, d'après mon ouïe, doit se trouver à quatre mètres de moi, me permets de savoir qu'elle s'ouvre. Je dois avouer que je suis assez fière de mon audition qui ne m'a pas lâchée. Une voix bourrue me surprend.
- Qui es-tu?
- Suis-je bien chez les parents de John Swan?
J'en veux à ma grand-mère de ne pas m'avoir dit que les parents de mon père sont encore en vie. Pourquoi ne m'a-t-elle rien dit ? Voulait-elle me garder rien que pour elle? Je soupire, attendant la réponse tardive. Dire que j'ai fait tout ce chemin pour savoir de nouvelles choses sur lui. Je piétine le sol sous mes pied, donnant l'impression d'avoir envie d'aller au toilette, ce qui est faux.
- Oui. Que nous veux-tu?
- Je suis sa fille, à lui et à Éloïse Swan. Je viens car j'ai envie de vous rencontrer.
Je ne peux voir sa surprise, mais je l'imagine fort bien. C'est plutôt amusant. Je ne peux m’empêcher de cacher mon sourire. Une voix féminine répond aussitôt à la place de celle qui doit être à mon grand-père.
- Oh... nous ne savions pas que tu venais. Entre donc ma chère enfant. Fais attention, ton grand-père a laissé traîner un peu partout ses affaires de jardinage.
Le doute apparait sur mon visage et je ne peux m'empêcher de baisser les yeux.
Une fois installée sur la canapé en cuir souple sur lequel on m'a indiqué de m'assoir, je pose mon sac sur mes genoux et soupire. Heureusement qu'ils m'ont indiqué le chemin. Je suis sur que je n'aurai pas apprécié de devoir aller de nouveau à l’hôpital. Cet endroit sent mauvais et est rempli de personnes qui ne pensent qu'à te soigner et avoir pitié de toi. On peut dire que je le déteste.
- J'aurais du vous le dire plus tôt. Je suis devenue aveugle à cause d'une maladie il y a quelque semaines. Ma mère est morte et j'habite chez ses parents. Mais je voulais vous rencontrez pour que vous me parliez de mon père. Cet endroit où mon père a grandi m'est inconnu et j'ai envie de la découvrir...
La surprise qui apparait sur mon visage est sans pareille. La vieille femme qui est la mère de mon père vient de me serrer dans ses bras en pleurant. Chose inattendue, mes larmes coulent aussi.
- Nous t'attendions depuis longtemps mon enfant. Reste aussi longtemps que tu veux.
Fin
Mélancolie Démentielle
MODOW SWIE I will never forget you...
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