Muet et Muet ça fait pas de bruit...ou pas [My God]

-|Nuage de la Lutine|-


Les hautes herbes de la lande ondoyaient souplement au rythme flûté du vent. Le soleil pointait le bout de son nez au dessus de la forêt, dégradant de rose et de jaune un ciel vide de nuages. Les plantes reluisaient de santé et de soleil. Les animaux trottaient frénétiquement dans l'espoir de trouver quelques graines. Les oiseaux voletaient, ballotés par le vent. Une silhouette solitaire se glissa dans la végétation et se tapit silencieusement, à l'affut. Une souris dodue trottina inconsciemment dans sa direction. Le temps qu'elle réalise qu'il y avait un chat devant elle, c'était trop tard; le félin avait déjà bondi sur la proie et l'avait achevée d'un coup de dent sec, brisant la fragile colonne vertébrale du rongeur qui rendit son dernier soupir.
Nuage de la Lutine s'était levée à l'aube pour aller chasser. Ayant eu une vie d'apprentie guérisseuse, elle n'avait jamais vraiment apprit mais Eclat du Firmament lui avait montré les bases et l'instinct avait fait le reste. Du coup elle ne se débrouillait pas trop mal. Elle achevait toujours très vite ses proies pour leur éviter de souffrir. Ce n'avait pas été le cas du sanguinaire apparemment...
Stigma...
Stigma à qui elle avait découvert un terrible secret, une identité véritable. Stigma que tout le monde considérait comme un affreux sanguinaire mais qui partageait aussi une vie d'apprenti du clan de l'ombre...Stigma qui lui avait volé sa jeunesse et son insouciance... Stigma qui était en réalité Nuage Pourpre et qui lui avait coupé la langue pour l'avoir découvert. Depuis, Nuage de la Lutine ne pouvait plus rien dire. Elle ne communiquait que par signes de tête ou par les yeux. Ses deux yeux bleu azur et bleu océan. Ses yeux qui brillaient et qui déversèrent une larme de malheur.

La novice se ressaisit et secoua la tête: pas question de chialer. Ce qui était fait était fait. pas la peine de le ressasser. OK, elle avait eu une vie de M****: Elle n'avait jamais connu ses parents, elle avait quitté son clan et elle avait perdu sa langue mais a part ça rien d'autre! Il fait beau, c'est le printemps!
Ses pensées furent déviées par un léger frémissement dans les herbes. Elle se pencha et darda son regard bleuté dans la végétation. Un campagnol! Et super gros avec ça! Eclat du firmament serait contente! Elle l'attrapa sans trop de peine et l'enterra. Cette réserve de viande lui ferait du bien. Un autre froufroutement lui fit tourner la tête: cette fois c'était trop grand pour être une proie. Elle s'approcha avec curiosité. Le froufroutement était très ténu et quasiment inaudible mais comme l'apprentie n'ouvrait plus sa gu*** , son oreille s'était formée et entendait un peu mieux. Une qualité très utile pour chasser. Ce qui bougeait les plantes était en fait un chat. Un autre félin comme tant d'autres dans cette forêt. Peut être un de ces imbéciles de solitaires qui dès qu'ils voient une femelle s'approchent avec un bruit digne de faire fuir toutes les proies à l'autre bout de la forêt... Non...l'inconnu n'y ressemblait pas. Il ne ressemblait même pas à un solitaire même si son profil disait qu'il aimait être seul. C'était un chat de clan...de l'ombre d'après l'odeur. Il tourna la tête vers elle et la dévisagea. Si Nuage de la Lutine avait pu rougir elle l'aurait fait. Le chat en question était plutôt mignon pour ne pas dire carrément beau. La néophite ne put soutenir son regard d'émeraude et s'attarda plutôt sur son physique. Il possédait un pelage majoritairement blanc et mis-long, comme elle. Sauf que lui, sa fourrure était parsemée de taches noires et rousses. Malgré son apparence, ses prunelles luisaient d'un éclat froid et agacé, comme s'il n'avait pas voulu être dérangé. L'apprentie contre toute attente ne lui glissa pas un bonjour. Evidemment! Elle était muette! Elle se détourna du mêle et l'ignora. Tant pis s'il la considérait comme une malpolie mais elle ne pouvait rien faire d'autre. Rien d'autre d'intelligent en tout cas. Elle aurait pu hocher la tête mais ça aurait été un peu débile...et puis pourquoi pas s'incliner encore? Elle aurait aussi pu rester en face de lui à le fixer bêtement, une gamine moche devant un beau guerrier. Rien d'autre. Du coup, à elle de paraître froide. Elle se doutait bien que le mâle s'en irait en la voyant. Tant pis... Elle tourna la tête par curiosité pour voir s'il s'était éloigné mais il était resté immobile, toujours en la regardant. Gênée, elle détourna son regard.

Une fine lueur de soleil vient interrompre son sommeil. Un trou se trouvait dans la paroi du gite des guerriers, un trou que personne n’avait vu apparemment. Et en plus, pour couronner le tout, il s’était dormi à l’endroit exact ou la lumière s’infiltrait. Les autres guerriers autour de lui dormaient paisiblement, il semblerait qu’aujourd’hui, le clan de l’ombre passe pour des chats qui ne font que dormir, ce qui l’amusait un peu. Il faut dire que ce clan n’est pas aussi réputé que tout le monde le dit, les rumeurs courent que ils sont des guerriers puissants, sanguinaires. Mais ce qu’il voyait ici n’avait rien d’effrayant. Il se levait enfin après quelques minutes, allongé la, immobile sans rien faire. Il chassait vite les dernières poussières de sommeil qu’il lui restait avant de bailler puis sortir de la tanière d’un pas lourd.

Les rayons du soleil le persécutèrent en plein visage. Le guerrier fermait vite les yeux, puis les ouvrit doucement, s’habituent doucement à la lumière. Il regardait autour de lui, ses yeux émeraudes fixaient les quelques félins déjà sorties dehors. Un ou deux guerriers se trouvaient par ci, des apprentis par la, mais pas beaucoup de monde. Il se faisait déjà assez tard, le soleil était presque a son zénith, midi s’approchant a grands pas. Il s’avançait vers le tas de gibier et prit une souris avant de s’asseoir dans l’ombre des arbres, à quelques pâtées de la tanière des apprentis. Crépuscule des Dieux avait l’habitude d’être seul, il aimait cela et il ne se montrait pas très coopérant avec ceux qui essayant de devenir son ami. Il était connu comme un des guerriers les plus forts du clan mais aussi presque celui le plus froid et distant des autres chats. Il était la plupart du temps de mauvaise humeur, en fait, non pas vraiment. Il en donnait l’impression. Et les chats n’aimaient pas vraiment le déranger car il était quelqu’un d’assez mystérieux et dur de commencer une conversation avec lui tandis qu’il sortit des devinettes les plus rusées.

Le guerrier se leva enfin après avoir finit son petit repas. Il se demandait ce qu’il allait faire aujourd’hui. En fait, c’était un peu absurde si il y avait quelque chose d’autre à faire que chasser pour le clan, c’est alors ce qu’il allait faire. Il dit bonjour à un guerrier du clan avant de prendre la sortie du campement et commencer la route vers l’endroit qu’il aimait tant, le Dernier Soupir. Qu’est-ce ? Une falaise, connue pour sa chute haute et profonde. L’endroit parfait pour commettre un suicide. Crépuscule des Dieux aimait cet endroit pour une raison simple et importante. On pouvait sentir la mort, le désespoir des chats autrefois venus, maintenant morts.

Il passait entre les branches, ses pas connaissant le chemin par cœur, prenant des raccourcis simples et en passant par le territoire d’autres clans, sans se faire voir. Il aimait briser les règles et savoir que personne ne lui dira ce qu’il doit faire et que personne ne le fera le faire. Il avait presque atteint sa destination quand il entendit quelque chose dans les buissons, tout près de la falaise. Une odeur vient chatouiller ses narines et le félin reconnu que c’était un chat mais un solitaire avec une petite fine touche de clan mais qui devait être vieux. Il franchit la barrière qui le bloquait du vue du félin. Il se retrouvait devant une féline pour être plus précise, une femelle au pelage blanc comme la neige. Elle avait des yeux bleus comme l’océan et fixait le jeune guerrier. Dieux ne savait pas si il devait continuer son chemin ou s’arrêter et parler avec l’apprentie solitaire. Il semblait soudain curieux. Que faisait-elle ici ? Il ouvrit la bouche pour parler mais la refermait tandis que la femelle se retournait pour faire face à son proie. Il était toujours la, immobile, l’observant. Elle regardait au dessus de son épaule pour voir si il était toujours la et quand leur regards se croisaient, elle détournait vite son regard. Dieux sourit sans savoir pourquoi.


- Bien le bonjour.

"-Bien le bonjour"


La jeune chatte sursauta en entendant la voix grave aux sons modulés de l'inconnu. Elle se sentit d'autant plus gênée qu'elle ne pouvait pas lui répondre. Elle se demanda si elle devait recommencer sa tâche sans plus s'occuper du guerrier mais elle n'était pas une asociale marginale et elle se dit qu'un handicap pouvait être surmonté. Surtout qu'elle avait envie de se lier d'amitié avec ce félin dont elle ne savait rien. Peut être était-ce l'un de ces sanguinaires sans vergogne qui attiraient les femelles pour le violer mais avec tout ce que la novice avait vécu, un malheur de plus ou de moins ne ferait pas une grande différence dans une vie qui ne valait plus rien. Elle hésita sur le signe à emprunter pour le saluer et opta finalement pour un léger hochement de tête et un regard grave qui en disait long sur sa condition. Le chat sembla comprendre son désarroi car il ne manifesta aucun signe de colère ou de frustration. En apparence du moins. Enivrée par le contact s'étant établi, Nuage e la Lutine voulut li demander qui il était mais ne sortirent de sa bouche qu'un vague balbutiement incompréhensible. La cicatrice mal refermée de sa langue se rouvrit alors et le sang chaud coula alors dans sa bouche lui rappelant le moment funeste ou le destin avait placé sur sa route le sanguinaire. Ses yeux se voilèrent et se brouillèrent de larmes. Elle avait honte de pleurer ainsi en public mais elle ne pouvait plus garder celà pour elle. Non. Ça ne relevait plus de sa compétence. Elle avait besoin de se vider, de se confier mais elle n'avait personne pour ça et surtout, pas les moyens. Seules les larmes pouvaient retracer la vie de quelqu'un mais elle ne pleurait pas souvent. Un filet d'hémoglobine coula sur son menton, tachant de grenat sa fourrure d'ivoire bleutée. Elle se vida de toutes les larmes de son corps tellement qu'elle se demandait ou elle allait chercher tout ça. L'autre chat semblait troublé, ne sachant pas trop quoi faire pour la consoler.

U.C