PaSsoire

Elle…une image floue et ondoyante comme la surface d'un étang. Son visage, sa main, ses yeux…Elle me sourit. Mon coeur s'emballe et cogne follement au creux de ma poitrine mais il arrive derrière moi. Ma gorge se sert. Ce n'était pas à moi qu'elle souriait mais à il. Il part avec elle et elle me lance un regard de haine…

Amandine se réveilla en sursaut, couverte de sueur.
-"Encore…" murmura-t-elle de façon inaudible. Ça faisait des mois qu'elle faisait toujours le même rêve. Des mois qu'elle se faisait torturer. Des mois que la vie ne lui laissait aucun répit ni le jour, ni la nuit. Des mois que cette malédiction était tombée sur elle…cette malédiction appelée amour. Dans les chansons, les livres, à la télé…ils disent tous que l'amour est la chose la plus belle au monde. Ils ont peut être raison mais pour eux qui sont beaux, doués…l'amour est chose facile. En revanche c'est beaucoup plus dur de voir l'amour sous un jour positif lorsqu'on fait un mètre cinquante-six, qu'on a des cheveux brun ternes sans caractère, des petits yeux couleur de boue inexpressifs et des boutons plein la gueule. Lorsqu'on porte un appareil dentaire et des lunettes. Lorsqu'on vient de quitter tous ses anciens amis pour s'établir ailleurs. C'est à cela que pensait Amandine. A cela ainsi qu'au commencement de l'histoire…

FLASH BACK

Amandine lança un regard blasé dehors. Elle voyait des petites maisons défiler devant ses yeux. Puis, elle reporta son attention sur ses converses noires.
-"Quand est ce qu'on arrive? demanda-t-elle pour la dixième fois.
- Bientôt ma chérie. Tu ne regarde pas dehors? Regarde comme ces maisons sont belles!"
L'adolescente ferma les yeux et vissa ses écouteurs sur ses oreilles. Dans ce genre de moment seule la musique pouvait la soulager. Elle aurait pu écouter de la musique dramatique mais elle ne voulait pas pleuré alors elle choisit plutôt un bon hard-rock et se concentra sur les beuglement du chanteur.
Le voyage se poursuivit, monotone jusqu'à ce que la voiture freine.
-"Voilà, on y est!" Lança joyeusement son père. Comment pouvait-il être joyeux pendant un déménagement? Evidemment, lui il allait juste devoir être délocalisé dans un autre poste de travail où il connaît déjà tout le monde. Elle non. Elle allait être collée dans une école quelconque avec des ados hostiles. Si encore elle avait déménagé quelques années plus tôt…elle se serait vite fait des amies mais depuis son passage dans "l'âge bête" comme disait sa mère, elle était devenue très timide. Elle hissa son sac en dehors de la voiture et détailla l'immeuble. C'était pas du truc du genre HLM mais c'était pas un immeuble de luxe non plus. Il était situé aux abords de la ville, à côté d'un jardin public. Il était peint en bleu mais on voyait bien qu'il n'était pas de la première jeunesse. Une porte vitrés donnait sur un escalier fiché entre deux plantes vertes de magazines. Il y avait une place de parc pour invités juste devant et un garage pour les résidents. Un énorme camion avec l'affiche "déménagement express" était stoppé au fond de la rue.
-"Notre nouveau chez-nous!" S'émerveilla sa mère. Amandine, elle, détesta aussitôt cet endroit. Un gros type musclé avança vers le camion et leur lança un "C'est fait!" au passage. Le gros véhicule démarra et partit. Le dernier espoir de retour était mort.
Ils entrèrent. L'intérieur sentait le détergent. Ils montèrent l'escalier pour aboutir devant le 23, une porte qui ressemblait à toutes les autres. Son père prit la clé et ouvrit. Ses parents avaient décidé de faire confiance aux déménageurs. Ils ne furent pas déçus. L'entrée donnait sur un couloir aboutissant à un salon et une cuisine séparés uniquement par une paroi immaculée. Au début du salon il y avait une porte donnant sur un autre couloir. C'est là que se trouvaient deux chambres et une salle de bain. La petite chambre fut attribuée à Amandine. Celle ci sombra aussitôt dans le sommeil sachant que la journée commençant demain serait la pire journée de sa vie: son entrés dans une nouvelle école.

-"Oui mademoiselle?
- Base fois hauteur le tout divisé par deux!
- C'est très bien. Bon maintenant qui peux me parler du périmètre…"
Le regard d'Amandine s'attarda sur celle qui avait répondu et sans savoir pourquoi, son coeur se mit à palpiter frénétiquement. C'était une fille assez grande aux cheveux blonds tels des blés en été, lisses comme de la soie et aux grands yeux d'azur. C'était la sixième fois qu'elle répondait. Une vraie intello. Jusqu'ici, Amandine n'y avait pas prêter d'importance mais là…
Ça faisait désormais six mois quels jeune fille était arrivée. Contrairement à toute attente, les gens de la classe s'étaient montrés prévenants envers elle. Elle jeta un coup d'oeil désolé en direction de Clara qui elle, en revanche, n'était pas épargnée. Assise dans le fond de la classe elle contemplait distraitement le rideau. Son malheur état d'être rêveuse et colérique envers les gens qu'elle n'aimait pas, ce qui lui avait attiré les foudres de toute la classe. Elle était définitivement classée dans le peloton des "rejetés" et rien de ce qu'elle ne pourrait dire ou faire ne pourrait changer les mentalités à son sujet. Amandine n'avait rien contre elle mais elle ne voulait à aucun prix la rejoindre dans ce groupe si méprisé donc elle ne traînait pas avec. A ses ôtés, était Lisa, une jeune fille en tenue de Cosplay: cheveux bleus et vêtements sexy. Elle aussi était rejetée pour sa différence. Amandine admirait en secret le style de cette fille mais ne l'avait jamais avoué. En revanche, la belle intellotte aux cheveux blonds était tout leur contraires: habillée normalement, caractère normal enfin…"normal"… C'était sensé être son amie mais ici, amie signifiait "fille qui se jette dans tes bras et qui te fait la bise mais qui te laisse tomber au moindre faux pas". Telle était la situation d'Amandine: acceptée mais pas immunisée.
Un étrange sentiment envahit le coeur d'Amandine lorsqu'elle reposa son regard noisette sur la nuque pâle de la jaune fille. La nuque à elle seule était parfaite: blanche, légèrement courbée. Quelques mèches blondes échappées d'un chignon voletaient au dessus comme des ailes de papillons. Le sentiment serra le coeur d'Amandine à lui en donner la nausée. A ce moment, elle se dit qu'elle ne pourrait plus jamais vivre sans cette fille. Un autre sentiment comprima son organe palpitant: la peur. Elle savait que ce qu'elle éprouvait c'était de l'amour. Or, ce n'était pas à un mec qu'il était destiné mais à une fille! Une sueur froide coula dans son dos.

Il y avait une fille avec laquelle Amandine entretenait une relation plus rapprochée qu'avec les autres. Une que l'on pourrait enfin qualifier d'Amie. Son nom était quelque chose comme Mélissa. Une belle fille aux cheveux noirs et aux bagues. Amandine avait découvert la sombre vérité au sujet de son amour il y avait deux mois. Elle n'avait pas oublié de le consigner en tout petit dans le journale intime qu'elle tenait régulièrement mais elle n'en parlait pas à quiconque. Elle invita la belle Mélissa à dormir chez elle, cette dernière accepta avec enthousiasme.
C'est ainsi que les deux filles se retrouvèrent dans la petite chambre d'Amandine.
-"Attend je vais chercher à boire. Installe toi!" Lui dit Amandine. Mélissa resta donc dans cette chambre si petite et exiguë. Elle regarda un peu autour d'elle et une chose l'intrigua: un tableau représentant une petite aquarelle. A priori l'aquarelle n'était pas extraordinaire mais pas trop laide non plus. Sauf que le tableau était de travers et que Mélissa était une fille plutôt maniaque. Elle s'approcha pour repousser le tableau mais derrière il y avait une petite cache creuse avec un journal. Un journal intime…
La conscience de la jeune fille fut déchirée entre la curiosité qui lui disait de lire le précieux document et son sens d'adolescente qui lui disait que si Amandine ferait pareil, elle ne serait pas contente. La curiosité l'emporta et elle s'empara du journal. Elle l'ouvrit et lu: aux premiers abords, rien d'intéressant. Les craintes d'Amandine quand à son premier jour d'école ici, ses peines après le déménagement. Mais ensuite ça devint plus intéressant: son admiration pour la tenue de Cosplay de Lisa. Un sourire fendit la bouche de Mélissa car elle aussi trouvait sa tenue trop sex. Elle le feuilleta jusqu'au bout mais elle n'y lut rien d'intéressant jusqu'à la dernière page qui était plus costauds que les autres. C'était deux pages collées ensembles. Elle y glissa les doigts et ce qu'elle y découvrit marqua un tournant dans sa vie.

Mon petit journal…je me sens mal. Je suis forcée de l'accepter mais j'aime Lou. Je suis attirée par elle comme un aimant. C'est vraiment horrible de m'avouer que je n'aurais jamais d'enfants, que j'aurais ma vie gâcher parce que je suis…Lesbienne…

Un éclat de colère et de frayeur s'insinua dans mélisse: Lou? La belle blonde sexy? Comment son "Amie" avait-elle pu lui cacher ça? Une Lesbienne… La jeune fille ne se réjouit plus du tout à la perspective de dormir chez elle. Et si elle en profitait…
La tête d'Amandine apparut dans l'entrebâillement de la porte.
"- Voilà je suis de ret…
- Bye je te quitte. je ne dort pas avec une Lesbienne. Désolée, je tient pas à me faire abuser pendant la nuit. Dit au revoir à mon amitié."
Elle sortit, laissant une Amandine éplorée. Lorsqu'elle entra dans la chambre, elle découvrit son journal. Ouvert. La page secrète décollée. Un grand gouffre de désespoir l'envahit. Pourquoi? POURQUOI? Qu'avait elle fait de mal mis à part être née comme ça?

Le lendemain elle alla à l'école comme d'habitude sauf que tout avait changé. Les filles ne lui faisaient plus du tout la bise et la regardaient d'un air moqueur.
Lorsqu'elle voulut prendre sa place habituelle à côté de Mélissa, cette dernière lui répondit:
"Je préfère ne pas avoir une lesbienne à mes côtés s'il te plaît."
Elle s'installa donc à une table seule au fond derrière Lisa. A la récré ce fut encore pire. Elle dut affronter les foudres, les insultes, les moqueries et le mépris de toute sa classe, y comprit de Lou. Elle accepta le tout avec stoïcisme. Mais à son retour elle s'effondra. Elle ne pourrait pas continuer comme ça. Elle ne pourrait plus jamais retrouver son amitié perdue. Elle ne pourrait plus jamais aimer. Lentement, très lentement, elle monta les escaliers jusqu'au sommet de son immeuble et regarda. D'ici elle dominait la cité. Un souffle de vent léger chantonnait entre les constructions de béton, faisant voleter ses cheveux. Toute ses craintes la quittèrent d'un seul coup. Elle s'approcha du bord. Le sol était loin en bas. Des larmes ruisselèrent de ses yeux.
"-Adieu" Murmura-t-elle.
Elle ouvrit les bras et fit un pas en avant.