Objets inanimés, avez vous une âme ? { Sankara =D}

Et entre les pierres, elle se releva. Encre... La chatte l'avait enterré quelques mètres plus haut, alors que la vallée baignée par le soleil s'offrait à ses yeux d'azur. Dans le calme parfait du crépuscule. Magnifique et accueillante. Ce sourire cachait un poignard. Aussi la ténébreuse était tombée de haut. Car pour l'instant, les plaines verdoyantes se trouvaient bien loin . Et dans cette vallée désolée elle avait passé la nuit. Entre les rochers escarpés, tranchants tels griffes et crocs. Des ombres menaçantes dansaient sous la demi-lune. Une dernière valse. Désespérée, sauvage, une guerre . La voyageuse les avait remarquées, ces sculptures. Des chats, griffes et crocs à nu, se sautant dessus dans une ultime bataille. Comme si la foudre les avait figés, ils restaient de pierre dans cette vallée. Et leur cris silencieux résonnaient encore et encore. Au soir, il avaient repris le combat. Elle les avait vus et entendus. Ces revenants avaient troublé son sommeil. Sommeil? Symphonie Ténébreuse s'était sentie incapable de dormir. Comme si elle avait ressenti une once de sentiment. Un sentiment de tristesse. Un gouffre sans fond qui vous attire sans cesse. Vous cherchez à lui échapper et il vous gèles sur place. Alors votre âme se consume sous le chagrin, encore et toujours. Et le sentiment tire vers le désespoir. Elle comprit que ce chat noir lui manquerait plus que prévu.

Ainsi, seule au milieu de la désolation, l'esseulée soupira. Sa solitude ne lui pesait pas, loin de là. En fait c'était un soupir de soulagement. Elle n'avait pas de sentiments, peut être quelques impression de ce que c'est, mais aucun sentiment réel. Tristesse, Haine, Joie, rien ne l'atteignait. C'était à l'étage en dessous, si loin d'elle. Une chatte emprisonnée dans une armure de glace, si indifférente au monde. Comme si de rien n'était. La ténébreuse pourrait regarder un de ses semblables mourir sans s'en soucier. On lui avait déjà posé la question. Comment faisait-t elle pour rester si froide ? La chatte noire n'avait pas répondu, comme d'habitude. Sur ces sombres pensées la vagabonde se retourna, pour observer. Cette statue de pierre, comme un corps figé. Elle le regarda longtemps. Puis son regard passa à l'adversaire. Pourquoi ? Pourquoi s'affronter. Désespoir, peur, haine ? Des sentiments, jamais elle ne comprendrait... Heureusement. Ces combattants de pierre reprenaient apparemment leur bataille le soir venu. Hum... Pourtant ils semblaient tout à fait normaux à la lueur du jour. Légèrement recouverts par une couche immaculée de neige, ces chats étaient apparemment ici depuis des années. Étrange. Ces lieux devaient être magiques, pourtant une espèce d'aura de force s'échappait des pierres. Et s'il avaient vécu, avant ? Question sans réponse, la solitaire ne leur poserait pas la question. A quoi bon parler quand personne ne vous écoute. Plus personne ne l'écouterait.

Symphonie Ténébreuse se mit à marcher. Laissant les statues derrière elle, la chatte se dissuadait de retourner sur la tombe du meneur. Son estomac grondait. De ce fait elle préféra se mettre en quête d'un repas. Pour le calmer, pour se calmer. Il fallait laisser le passé où il était, même si ce dernier ne se trouvait pas très loin derrière nous. Tout en réfléchissant, seule au milieu de la désolation,unique tâche noire sur la surface immaculée, la vagabonde cherchait une proie. N'importe laquelle. Silencieuse telle une ombre, elle scrutait les environs de son regard de glace. Aucun mouvement, le calme plat. La solitaire sentait la pierre même sous la neige lui entailler les coussinets au fur et à mesure qu'elle avançait. Toujours aucun signe de vie. Comme si le fracas des combats du soir n'étaient qu'un lointain souvenir. Finalement, une présence. La ténébreuse fit volte face. Il y avait quelqu'un, inutile de le nier. Cependant cette personne restait invisible à ses yeux. Personne, mais la présence restait là.

<< Allons, montre toi. Je ne vais pas te manger. >>

Miaula tranquillement l'esseulée.

La présence se décida enfin à dévoiler son visage. Quel félin cela pouvait-t il être ? Noir, gris, blanc ? Grand, petit ? Mais surtout, ami où ennemi ? Symphonie Ténébreuse n'avait jamais réellement fait attention à ses actes. Qu'ils soient bons où mauvais lui importaient peu, elle n'avait aucune morale de toutes manières. Et des remords ne risquaient pas de surgir d'où que ce soit. Pendant quelques instants elle songea à attaquer. Remarque, quelle utilité ? Elle récolterait quelques blessures. De plus, la chatte noire avait bien précisé ne pas être hostile. Alors autant tenir parole. Elle laissa donc une femelle au poil couleur d'or faire son entrée. Pelage ni long ni court, yeux ambrés, un ventre plutôt rebondi. L'inconnue devait probablement attendre des petits. Raison de plus pour ne pas l'attaquer ! Même si la ténébreuse se fichait du bien et du mal, faire du mal aux chatons, chattes enceinte et chats "handicapés" passait au dessus de ses forces. En revanche, achever un adversaire mourant , elle s'en moquait bien. Ainsi la nouvelle venue souriait, comme si elle trouvait cela drôle. L'amusement... un autre sentiment. Ses yeux étincelaient comme des étoiles tandis qu'elle s'asseyait.

<< - Je n’en doute pas. D’où viens-tu ? >>

Miaula-t elle avec un certain amusement. Symphonie Ténébreuse ne répondit pas immédiatement. Que répondre. D'où venait-t elle, si seulement elle savait. C'était loin d'ici, si loin. Les chats d'ici ne devaient pas connaître. Et la chatte noire ne pouvait pas prétendre venir de tel où tel Clan, elle ne savait même pas s'il y en avait dans cette contrée. S'asseyant dans la neige immaculée, l'esseulée laissa sa longue queue s'enrouler autour de ses pattes couleur charbon. Elle planta son regard glacial dans celui de son interlocutrice. Regard vide avec une part de mystère. Toujours aucun sentiment. Ça ne changerait jamais, surtout depuis le départ d'Encre.

<< Je viens de loin, très loin d'ici. Entre la Vallée des mirages et celle de l'Utopie. Au delà des montagnes, rivières et lacs que tu connais. Je suis arrivée hier soir, mais le félin qui m'accompagnait est mort sur l'arrivée. >>

Miaula-t elle avec... un soupçon de tristesse ? Plait-t il ? Non, c'était impossible. Plutôt une impression de tristesse, une feinte pour paraitre ordinaire . La solitaire se tut après avoir parlé clairement, on lui avait demandé une information la voici. C'était tout.

Le bonheur ton objectif.

La chatte sembla s'offusquer de la question de la solitaire. Sankara en fut désolée, elle ne voulait en aucuns cas la blesser. La chatte en face d'elle plongeat dans ses souvenirs, les yeux lourds d'un certain passé compliqué. L'expression fatiguée que la chatte dorée vit passer sur le visage angélique de la féline inconnue, l'horrifia. De ses prunelles dorées, elle essaya en vain de déceler un doux souvenirs, et non pas quelque chose d'amer. Juste une bribe heureuse, mais rien. Seulement le vide dans ses prunelles glaciales. Sankara sentit un frisson démesuré lui parcourir l'échine. Elle tenta, en vain, de sourir. Puis cessa d'élargire inutilement ses babines, de se faire mal pour rien. Elle s'approcha doucement de la chatte. Elle était comme ça. Réconforter, aimer, aider. La mère thérésa féline réincarnée. Elle aurait voulu pouvoir poser le bout de sa queue rousse sur l'épaule forte de la chatte mais quelque chose l'en empêchait. Cette sorte de couche hostile qui entourait la femelle. Cette bulle désagréable repoussait Sankara. Elle s'y cogna plusieurs fois puis s'y résolut et resta là, à regarder la vie des arbres. Les écureuils roux se faisant la coure, les merles s'égosillant du haut de leurs branches, les feuilles s'ouvrant, sous les claques des rayons du soleil. Et puis ces trous dans la terre. Ces gouffres. Elle se dit qu'être si malheureux devait être si facile. Elle se demanda alors pourquoi elle ne l'avait jamais vraiment été elle ? Pourquoi sa vie filait, heureuse, belle, rayonnante ? Non, elle ne se plaignait pas mais elle aimerait ressentir pour une fois, autre chose que de la joie. Juste une pointe de douleur, de désespoir. Sankara secoua soudainement la tête, chassant de sa tête des idées qu'elle jugea par la suite complètement idiotes.

<< Je viens de loin, très loin d'ici. Entre la Vallée des mirages et celle de l'Utopie. Au delà des montagnes, rivières et lacs que tu connais. Je suis arrivée hier soir, mais le félin qui m'accompagnait est mort sur l'arrivée. >>

Sankara avait donc raison, la chatte avait perdu un être cher. Elle le savait et arrivait à déceler chez un autre félin le décé d'un des membres de son coeur. C'était une sorte de don certainement. Elle avait déjà pensé le mettre au profit des autres félins mais s'était vite ravisée, s'étant imaginée en nouveau croque-mort. La chatte observa encore quelques instants la femelle aux couleurs sombres puis pensa que la dévisager ouvertement n'était pas le meilleur acceuil qu'elle puisse lui donner. Elle passa sa langue rose et râpeuse sur ses babines, comme pour s'aider à réfléchir. La chatte ne lui avait pas renvoyé la question. Soit elle se foutait royalement de ce que pensait la chatte dorée, soit elle avait oublié, tourmentée par sa situation actuelle. Sankara espérait secrétement que la deuxième proposition soit la bonne. Quoi que. Après tout, elle se fichait de ce que pensait cette féline. Si elle ne voulait pas la connaitre, ce n'était pas grave, elle s'en foutait même fichtrement. Elle ne savait pas ce qu'elle ratait. Sankara cligna des yeux, rapidement et une lueur amusée s'enflamma au fin fond de ses pupilles auréolées d'or. De sa voix clairsemée, elle lui lança, pour simple réponse à une question inéxistante.

- Moi je viens d'ici, c'est ma forêt, ma vie.

L'inconnue semblait choquée. Pas ua sens propre, mais un minimum tout de même. Elle cherchait vainement une étincelle de vie dans les yeux de son interlocutrice. Mais c'était impossible, cette dernière le savait bien. Elle l'empêchait d'atteindre la "porte". L'endroit par lequel on entrait sous la glace. Melody le savait, cette solitaire se heurta plusieurs fois au mur froid, érigé entre son esprit et la réalité. De sorte à ce qu'elle restes indifférente à son entourage. Elle finit par être parcourue d'un long frisson, à fixer ainsi les yeux de la vagabonde. C'était normal, et si elle avait continué elle aurait froid. Peut être aurait-t elle même finit maudite. Ce devait être sa faute, si le Rêve avait été décimé, et l'Anarchie morte à petit feu. Pour l'avoir accueillie, ces deux tribus avaient disparu. Raison de lus pour rester solitaire. La chatte ne voulait pas continuer à faire involontairement le mal autour d'elle. A tuer des félins par son regard . C'était simplement horrible. Et la solitaire l'avait prévenu, son partenaire de voyage. Elle lui avait conseillé de ne pas regarder ses yeux. Mais Encre n'écoutait jamais ses paroles. Malgré l'obstination de la ténébreuse à se détourner dès qu'il regardait vers elle, le meneur avait fini par l'amadouer. Littéralement. Le seul félin à la fixer dans les yeux longtemps sans rien ressentir de froid.Le seul "autorisé" pour ainsi dire à fixer ses yeux . Il pénétrai en elle, sous la glace pour y pêcher quelques sentiments. Et ça lui avait coûté la vie. La chatte noire le savait. Ce n'était pas à cause du voyage, à part logiquement. Il avait trop regardé ces yeux pendant le voyage. Pas étonnant, la vagabonde était la seule à l'accompagner vers la fin. Finalement Encre s'en était allé, à cause de ces yeux. Symphonie Ténébreuse aurait voulu les crever, pour qu'ils laissent le monde tranquille. Mais impossible de s'y résoudre. Certains terres étaient trop belles pour ne pas être vues. Et au final elle en était là.

<< - Moi je viens d'ici, c'est ma forêt, ma vie. >>

Miaula l'animal doré. Elle qui avait renoncé à continuer avec ce regard froid. En revanche, le regard de l'inconnue brillait d'une flamme d'amusement. Franchement, la ténébreuse ne voyait pas trop ce qu'il y avait de drôle. Remarque, sans sentiments elle ne pouvait pas savoir. A la limite deviner ceux des autres, mais pas les ressentir. Peut être le fait de répondre à une question que la vagabonde ne s'était pas embêtée à poser l'amusait. Probable. on ne sait jamais à quoi s'attendre avec des inconnus. Ce qu'ils pouvaient être étranges les félins de ces contrés. Ceux du Rêve et de l'Anarchie étaient à peu près tous aussi glaciaux que la féline couleur charbon. Bon, voyons voir. Que lui avait-t on enseigné sur les formalités et concernant la politesse. Heum~ La vagabonde leva la tête vers les cieux quelques instants, comme cherchant une réponse parmi ses congénères montés dans les nuages. Bien qu'elle s'en fiches pas mal, ça pouvait toujours lui servir à quelque chose un jour. Ah, n'était-t on pas censé demander son nom à son interlocuteur ? Peut être, qui sait. Sa longue queue enroulée autour de ses pattes abritant de longues griffes. Baissant la tête à la hauteur de l'inconnue dorée, elle miaula sans trop de conviction.

<< Ah, d'accord. Quel est ton nom ? >>

La solitaire évitait soigneusement de croiser le regard de son interlocutrice. Pas question qu'elle meures aussi bêtement qu'Encre. Pas question que d'autres subissent la douleur de la perte d'une mère. La plainte résonnerait encore une fois. Symphonie Ténébreuse ne supporterait pas cela.