Le silence et moi ~ Wood

« Je ne savais pas que la vie pouvait etre aussi triste, aussi mélancolie. Je croyais etre le seul dans ce monde noir mais au final, nous sommes tous, un jour ou l’autre, des serviteurs du monde. »

https://www.youtube.com/watch?v=aCilexW-RG0


Il ouvrit doucement les yeux. Puis baillait. Il regardait autour de lui et soupirait. Il se trouvait dans le gite des guerriers, au milieu des corps endormies. Il avait encore fait un cauchemar, ces rêves qui nous remplissent d’horreur et d’angoisse. Il faisait encore nuit, aucune lumière ne filtrait à travers les branches et feuilles de la tanière. Il se leva enfin, s’étira puis commençait à prendre la direction de la sortie, poussant les fils de feuilles pour se retrouver au bon milieu de la clairière du clan de l’ombre. Le vent soufflait doucement autour de lui et le mettre de la nuit, le Diable, les ombres n’étaient pas encore parties, leur heure viendra dans quelques instants.

Un petit oiseau chantait sur une branche d’un arbre. La nuit finissait bientôt, car l’horizon apparut, rempli de couleurs chauds, de couleurs du printemps. Les fleurs des prairies et champs commençaient doucement à sortir, s’épanouir. La nature allait bientôt prendre le relaie, le gibier ne manquera plus, tout le monde sera content. Le bonheur, il n’aimait pas ca. Mais même lui, était content de savoir qu’il n’y aura plus de neige, plus d’hiver froid.

Il marchait doucement, prenant son temps. Il traversait un chemin du tonnerre puis s’engageait dans un champ avant d’en sortir pour se trouver sur les terres libres des clans. Tout le monde pouvait se promener ici, et malheureusement il ne cherchait que la paix. Il ne voulait voir personne, ne sentir personne, n’entendre personne. Mais il savait aussi que cela était tout simplement impossible dans ce petit monde de chats. Il continuait dans la direction voulue, trottinant pendant plusieurs minutes avant de trouver l’endroit qu’il cherchait. Au delà du champ de fleurs, il voyait une colline, une grande colline. On pouvait croire qu’il touchait le ciel tellement son mur de pierre était élevé. Il sourit. Puis avançait dans les champs avant d’en sortir de l’autre coté, commencer sa montée sur la colline. Le dernier soupir. Oui, comme presque tous les endroits des terres libres, il y a une légende liée à celui-ci. On disait que ceux qui voulaient finir leur vie pourriront sauter d’en haut, la chute étant mortels. On dit que si on regarde en bas de la fosse, on ferait des milliers de corps sans vie, et du rouge sur les rochers du sol. Bien sur, il ne croyait pas à ces bêtises. Car un chat se suicider, ce n’est pas réaliste. Ca n’existe pas. Seuls ces bipèdes à la noix ont le droit de le faire, les pensées de le faire. Un chat ne peut pas se suicider, il peut commettre des meurtres, il peut penser, il peut parler et on continue. Mais se tuer, ce n’est pas possible, ca ne fait pas de sens.

En haut de la colline, près du bord, il s’assit. Il regardait autour de lui, le magnifique paysage que s’offrait a lui. D’ici, il pouvait tout voir.


- Nous voila enfin seuls. Toi et moi. La colline et moi. Le paysage et moi.


Il levait les yeux au ciel.


- Le silence et moi.

L’ancien chat errant se leva du nid de mousse qu’on lui avait offert, sans grande joie. Il n’était pas fanatique de cette vie de chat protégé, stressé du moindre danger. Lui, était habitué à une vie simple, une vie trainée de supplice, de chasse et de défense de territoire. Il avait perdue son habitude enfantine de vivre en Clan, et il y avait perdu tout goût aussi. Heureusement, il y avait son frère, lui était plus compréhensif. Il avait compris que contrairement à ses chats de Clan, Oubli Acariâtre, n’avait jamais eu cette éducation, il faisait partie du Clan car il y était né mais jamais personne n’avait connu ce chat dans son enfance ni dans son adolescence, on connaissait le chat sauvage, adulte, revenu après plus de trois ans d’absence, mais maintenant qu’il est de retour, on regrette tous son retour.

Cah passa le tunnel qui menait à l’extérieur, à l’abri de tous ces regards. Il passa le chemin pratiqué par tous les chats du Clan de la Rivière, Clan auquel il ré-appartenait depuis deux jours seulement. Il suivait du regard cette colline, la colline sur laquelle il avait passé les trois dernières années de sa vie. Il enjamba facilement mais avec quelques souvenirs incertains, le ruisseau dans lequel il était mort noyé, dans lequel personne n’avait retrouvé de ses traces. Il y était vraiment mort, mort oublié. On peut dire que c’est de là que lui vient le nom qu’il s’est lui-même donné, sans mûre réflexion, car c’était le seul qui lui traversait l’esprit : Oubli Acariâtre.

Une touffe de ses poils noirs resta accrochée dans le buisson d’aubépine qu’il traversa. Oubli Acariâtre connaissait ce chemin par cœur, celui qui le mouvait jusqu’au ruisseau, sa source de souvenir. Le ruisseau, le seul point qui raccroche sa vie à celle de ses frères, le lieu de sa « mort » son existence cachée recèle pour tous des interrogations, des réponses à leurs propres existence, comment un chat peut-il vivre en se sachant oublié de tous, en se sachant mort par la pensée des autres, de sa famille. Cah escalada la colline, sans mal. Ses yeux azurés le guidèrent jusqu’au petit renfoncement qu’il connaissait par cœur, ce renfoncement qu’il avait baptisé « le trou où ne souffle le vent ». Cet endroit où il avait passé ses nuits pendant les années où il était encore mort aux yeux de tous. Le trou contenait encore son odeur, délicate, qui désormais était pourrie avec celle du Clan de la Rivière, bizarrement, il regrettait un peu d’avoir quitté sa vie de solitaire pour retrouver son Clan natale, mais cette pensée ne dura qu’une infime seconde, il ne devait pas penser ça, il devait penser à son frère, à sa famille, et à tout ce qu’il avait raté en se voulant mort, alors que ce mensonge, l’avait détruit au plus profond de son être.

Un chat dont il ne connaissait que vaguement l’odeur passa par là. Il reconnu l’odeur quelque peu sentie lorsqu’il vivait encore en ses lieux. L’animal en question était un chat du Clan de l’Ombre, mais il ne voyait aucune rivalité de Clans mais bien un animal perdu et autant que lui, habitué à ses lieux pourtant quelques peu hostiles par la falaise dangereuse qui laissait voir des chats tenter de rendre l’âme, oui il avait déjà vu un chat se jeter dans le vide, une fois. Il voyait tout ce qu’il se passait, il entendait tout, après tout il se mouvait comme le vent, silencieusement en ces lieux et portait l’odeur de cet endroit, ou plutôt, l’endroit portait son odeur. Il écouta les paroles perdues de ce chat …



"Nous voilà enfin seuls. Toi et moi. La colline et moi. Le paysage et moi."



Etrange. Ce chat était différent mais il considérait la colline comme un être, sans même sentir la présence de ce chat tapit derrière lui à écouter ses paroles insensées.



" - Le silence et moi

- Le silence et nous. "



Oubli Acariâtre n’avait pas raté l’occasion de se faire entendre, il se plaça habilement dans le champ de vision du félin de l’Ombre. Pourquoi rater une chance de découvrir un de ses « colocataires » de terrain. Même si Cah n’était pas du genre à partager son ancien territoire, les passages de chats ne le dérangeaient pas et il ne voyait pas se qui dérangeait les Clans sur ce point.

Crépuscule des Dieux fixait un point invisible au loin. Ses yeux restaient rivés sur ce même point. Il était sur la lune, une des expressions favorites des spectateurs. Il pensait. Il rêvait. En fermant les yeux, il voyait son passé, ce petit chaton tricolore tapis au cotés de deux chats, ses parents. Ce souvenir le hantait encore aujourd’hui, il n’avait pas oublié aussi facilement leur mort, ils lui manquaient beaucoup, un peu trop même. Des fois, on avait l’impression que Dieux était redevenu un petit chaton faible, cherchant ses parents des yeux.

Mais les souvenirs ne sont que des parcelles de mémoire, un jour, nous oublierons tout. Mais le félin ne voulait plus rien oublier, il avait laissé le passée derrière mais avait aussi tournée son dos a celui-ci et ou est-ce que cela lui a mené ? Nulle part. Le vent soufflait doucement parmi les arbres, et il avait l’impression d’être poussé encore plus vers la chute de la falaise. Mais il n’était pas si dupe, il n’allait surtout pas sauter, il n’était pas un de ces idiots qui ont donné leur vie. Et puis, on ne sait pas s’ils sont ou non au clan des étoiles. Oui, car une suicide ne nous amène pas au paradis, mais dans l’endroit le plus diabolique et noir de la planète, oui, on parle bien de l’enfer.

Soudain, une odeur d’un autre félin apparut dans l’air. Il n’était pas bien loin, il s’approchait de plus en plus même. Dieux soupira. Ce n’était pas vraiment le bon moment choisi pour venir l’interrompre, il n’était pas vraiment de bonne humeur et il avait espéré pendant un moment qu’il aurait enfin la paix en venant ici mais bien sur, c’était des rêves trop beaux pour être vrais. Une lueur farouche apparut dans ses yeux tandis qu’il sentit la présence du félin derrière lui, l’observant dans son dos. Un frisson parcourut les os de Dieux, il n’aimait pas être fixé comme cela même si il faisait pareil avec les autres intrus. L’inconnu avait l’odeur du clan de la rivière mais l’odeur n’était pas fort, masquée par celle de la solitude. Dieux ne se retournait pas, il ne voyait pas la peine en fait.

- Le silence et nous.

Crépuscule des Dieux sourit. Tiens, alors il n’était pas le seul être insensé ici. Il fixait le paysage de ses yeux verts émeraude tandis que le chat ennemi se plaçait dans son champ de vision juste a coté de lui, l’observant. Il ne savait pas s’il devait garder le silence pendant quelques instants ou le briser en disant tout simplement quelque chose qui peut s’avérer soit intelligent, soit débile, idiot. Il se contenta alors de regarder l’autre chat. Celui-ci semblait un peu différent des autres. Les chats du clan de la rivière n’étaient pas le genre à répliquer juste comme ca, parler, continuer la phrase d’un autre chat ennemi avec sagesse. Crépuscule des Dieux ne connaissait pas bien les chats des autres clans mais assez pour savoir cela. Il passait la plupart du temps au clan de l’ombre ou dans ses territoires à chasser le gibier. Les seuls fois ou il avait appris des choses des autres étaient pendant leur combat.


- Voila de la compagnie.


Il se tournait vers lui, le fixant de son regard froid. Crépuscule des Dieux ne voulait pas être méchant mais c’était plus fort que lui, il avait cette habitude de montrer la distance entre eux, montrer qu’il ne voulait pas parler. Mais cette fois, il semblait curieux. Curieux d’apprendre plus sur l’autre.


- Tiens, un nouveau membre au clan de la rivière ?, dit-il d’une voix amusée.